Sur le vif !

Boire un peu, beau­coup, passion­né­ment mais toujours avec discer­ne­ment

Exprimer
mon existence
chaotique
et fragile
en buvant 
un peu, 
beaucoup,
passionnément 
mais toujours
avec discernement ;
duper 
ma mémoire
pour m'accaparer 
tous mes souvenirs
évanescents,
me les restituer
moins brouillons.

Me remémorer
ces périodes
durant lesquelles
quelque chose
clochait
dans ma tête ;
visualiser
ces périodes 
durant lesquelles
j'empruntais
des chemins
malaisés
rendant 
mon trajet
bien plus difficile
qu'il n'aurait dû l'être.

Me revoir
adolescent
marcher dans un champ 
de blé pendant que 
le soleil bouillonnant
dans un océan bleu
accablait une terre aride ;
pas un souffle de vent,
pas l'ombre d'un arbre, 
plus un seul chant d'oiseaux,
plus de stridulation de grillons,
car l'après-midi 
chuchotait sa peine
aux herbes folles ;
toucher
du bout des doigts
les épis de blé,
sentir la vague
de chaleur estivale 
brûler mes épaules dénudées,
respirer avec difficulté
les arômes 
de cette fournaise
du terroir.

Puis,
la fin du film ;
le noir absolu
des souvenirs
anciens,
pourquoi
apparaît-il
dans la fraîcheur 
du crépuscule ?
Maintenant 
que le soleil se couche,
ma mémoire s'éclipse
sous les étoiles ;
ne pas chercher 
à comprendre
mon esprit,
lui et moi
subissant
le confinement
entre quatre murs,
loin de la pandémie.

Boire
un peu, 
beaucoup
passionnément 
mais toujours
avec discernement
pour oublier
un ennemi invisible.
Poème de Jean-Michel Léglise – mars 2020

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