En 2020

Pour ne rien vous cacher, je n’aime pas janvier !

En janvier, il y a deux sujets qui atteignent l’apo­gée de mon exas­pé­ra­tion. Le premier est assez socié­tal et compor­te­men­tal, les vœux pour la nouvelle année. Le second est plutôt person­nel, cela concerne mon anni­ver­saire. Alors, pendant que les convives se font la bise pour se souhai­ter la bonne année – en affi­chant sur le visage ce petit sourire surjoué et hypo­crite pour la circons­tance –, eh bien moi je râle bien fort d’une voix inau­dible dans ma tête. Imagi­nez la situa­tion dans laquelle je me trouve. À peine aurais-je le temps de termi­ner la diges­tion du repas de la Saint Sylvestre et de me désen­ivrer des alcools de la soirée qu’une année de plus se posera sur mes épaules. J’en ai déjà un certain nombre, alors cela commence à peser sur ma carcasse.

   Heureu­se­ment pour moi, le destin a été indul­gent en m’évi­tant de naître le 1er janvier. Sinon après les douze coups de minuit, et après les sempi­ter­nels vœux de santé, de bonheur et d’amour pour la nouvelle année, j’au­rais dû accep­ter sans bron­cher les nombreuses formules de féli­ci­ta­tions d’an­ni­ver­saire des convives ivres. Subir leur haleine char­gée. Remer­cier celui que je ne connais pas (un ami d’un ami étant l’ami de mon ami, bref un inconnu en somme). Non sur ce coup, j’ai eu de la chance. J’ai pointé le bout de mon nez vingt-neuf heures et trente-cinq minutes plus tard.
 
   Toute­fois, les premiers jours de janvier me procurent deux avan­tages de circons­tance qui me sont assez favo­rables. La première, concerne les dépenses pour mon repas d’an­ni­ver­saire en alcool et en victuailles. Il n’y en a peu voire pas du tout. Si je parle de nour­ri­ture, tout le monde se sent nauséeux après les excès des deux réveillons passés. Chacun dési­rant lais­ser pendant quelque temps son foie se repo­ser. Et ce n’est pas mon porte­feuille qui s’en plain­dra. La seconde, quitte à chif­frer mon âge — acte inéluc­table —, je préfère que cela se passe juste après le passage de la nouvelle année (avec la migraine du réveillon en plus). De cette façon, mon esprit accepte un ensemble d’évé­ne­ments qui me sont désa­gréables et il n’aura plus à les abor­der pour le reste de l’an­née.
 
   Le deuxième sujet que j’aborde dans cette chro­nique me hérisse fort bien le poil : les vœux de bonne année. Avec fran­chise (cela restera entre nous), cela ne vous fatigue pas d’en rece­voir ? Allez soyez honnête ! À combien de personnes expé­diez-vous ce type de message alors que vous n’avez aucune nouvelle de certaines d’entre elles depuis les onze précé­dents mois ? Et que vous n’en aurez pas davan­tage les onze suivants ? Sans oublier celles et ceux qui n’ont pas votre numéro de télé­phone dans leur réper­toire télé­pho­nique, (vous si, mais on ne vous deman­dera pas pourquoi) et qui vous répondent plutôt un « T’es qui ? » au lieu du tradi­tion­nel message « Je te souhaite une bonne année ». Et tout cela exécuté dans la préci­pi­ta­tion et en masse (cour­riels et SMS grou­pés) afin de se débar­ras­ser de la corvée.
 
   Souve­nez-vous (je parle pour les plus de vingt ans, désolé la géné­ra­tion Z…) de cette époque où nous disions nos vœux exclu­si­ve­ment de VIVE VOIX pendant le réveillon. De cette époque où nous appe­lions nos proches et nos amis avec le TÉLÉPHONE FIXE le jour de l’an. De cette époque où nous envoyions des cartes de vœux par VOIE POSTALE au reste de la famille voire aux connais­sances. (Cela permet­tait aussi de se rappe­ler des personnes qui avaient cassé leur pipe durant l’an­née par le nombre de cartes restantes à rédi­ger.) À partir de l’an deux mille, la manière de présen­ter nos vœux a bien changé. Au début de l’ère du télé­phone mobile, dès les douze coups de minuit et le claquage de bises, un grand nombre d’in­di­vi­dus se vissait à leur télé­phone pour tenter d’ap­pe­ler leurs amis ou les membres de leur famille. Consé­quence, ils satu­raient le réseau. Ils oubliaient de facto les invi­tés présents au réveillon de la Saint Sylvestre ne possé­dant pas de mobile. Ensuite, ils sont passés aux SMS et aux MMS. Évidem­ment, personne n’avait changé ses habi­tudes de malo­tru… minuit passé, chacun rédi­geait fréné­tique­ment son message pour l’en­voyer illico. Être le premier expé­di­teur à 0 h 01. Mais le réseau fut égale­ment saturé les premières années. Main­te­nant, pour les plus malins (et peut-être à cause des deux grammes d’al­cool dans chaque poche, pas facile de piano­ter sur les touches de son smart­phone en étant soûl), les SMS sont program­més la veille pour être envoyés à l’heure dési­rée.
 
   Néan­moins depuis quelques années, le procédé a changé ! La tendance est de présen­ter ses vœux sur les réseaux sociaux. Face­book, Insta­gram et j’en passe car je ne connais pas les autres — trop nombreux ou alors je deviens trop vieux pour suivre l’évo­lu­tion grotesque de ce monde virtuel. Main­te­nant, on se contre­fiche du message person­na­lisé pour chacun qui prend du temps ; main­te­nant on pratique le message de masse plus facile et plus rapide à rédi­ger. Le procédé se rode : Soit tu es AMI avec la personne et tu lis son message publié sur son mur, soit tu ne l’es pas et tu n’es pas au courant de son mot. Et si toute­fois tu es AMI avec lui et que tu ne vois pas défi­ler ce satané message, eh bien alors c’est que tu ne mérites pas d’être AMI avec lui ! Capiscé ? Tu n’avais qu’à être plus assidu à parcou­rir ton fichu mur d’ac­tua­lité Face­book ou Insta­gram au lieu d’at­tendre un éven­tuel SMS sur ton smart­phone. Perni­cieuse est l’idée de diffu­ser ses vœux sur les réseaux sociaux ! N’est-ce pas ? De plus, nous avons tout le mois de janvier pour les présen­ter. Nous allons encore nous en manger quelques-uns.
 

   Eh bien moi, pour m’évi­ter d’en­voyer des SMS ou des cour­riels, je rédige les miens ici. Aussi, je vous présente mes meilleurs vœux pour cette nouvelle année, qu’elle apporte à votre famille et à vous-même, la santé, le bonheur et la pros­pé­rité. Quoi ? Vous ne pensiez pas que j’al­lais diffu­ser mes vœux pour la nouvelle année sur mon blog ? Eh bien vous voyez, je deviens feignant avec l’âge.

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